Ce droit de retrait doit être utilisé avec grande prudence dans nos établissements car il est conditionné à des conditions restrictives et l’utilisation du droit d’alerte danger grave et imminent doit être privilégié par les représentants du personnel au CSE et au CHSCT dans les établissements de la FPH.
Les recommandations sanitaires à faire respecter sur les lieux de travail
Dans le contexte actuel, il y a lieu de distinguer deux situations :
- lorsque les contacts sont brefs : Si l’employeur a mis en œuvre les dispositions prévues par le code du travail et les recommandations nationales tels que les mesures « barrières », disponibles et actualisées sur le site https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus visant à protéger la santé et à assurer la sécurité de son personnel, qu’il a informé et préparé son personnel, notamment dans le cadre des institutions représentatives du personnel, alors le droit individuel de retrait ne peut pas, en principe, trouver à s’exercer.
- lorsque les contacts sont prolongés et proches : Il y a lieu de compléter les mesures barrières par exemple par l’installation d’une zone de courtoisie d’un mètre, par le nettoyage des surfaces avec un produit approprié, ainsi que par le lavage des mains.
Dans ces conditions, dès lors que sont mises en œuvre, tant par l’employeur que par les salariés, les recommandations du gouvernement , disponibles et actualisées, la seule circonstance que le salarié soit affecté à l’accueil du public et pour des contacts prolongés et proches ne suffit pas sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, à considérer que je justifie d’un motif raisonnable pour exercer le droit de retrait.
Les gestes barrières sont les suivants :
- Se laver les mains très régulièrement
- Tousser ou éternuer dans son coude ou dans un mouchoir
- Saluer sans se serrer la main, éviter les embrassades
- Utiliser des mouchoirs à usage unique et les jeter
- Éviter les rassemblements, limiter les déplacements et les contacts
Par ailleurs, selon le Gouvernement, si un professionnel de santé ne présentant pas de symptômes mais qui a eu un contact avec une personne malade du COVID-19 en l’absence de mesures de protection appropriées, il doit alors s’auto-surveiller en prenant sa température 2 fois par jour, appliquer les gestes barrières (en sa lavant les mains très régulièrement, éternuer dans son coude, utiliser des mouchoirs à usage unique, saluer sans serrer la main et éviter les embrassades), porter un masque sur son lieu de travail et avec les malades, contacter un médecin et se faire tester systématiquement en cas d’apparition de symptôme.
L’exercice du droit de retrait
Le droit de retrait ne peut être exercé qu’en cas de situation professionnelle présentant un danger grave et imminent pour la santé physique des salariés.
Ces dispositions prévues par l’article L. 4131-1 du Code du travail sont aussi applicables aux agents de la fonction publique hospitalière. Toutefois, le droit de retrait doit être exercé de telle manière qu’elle ne puisse créer pour autrui une nouvelle situation de danger grave et imminent.
Dans ce cas, les textes prévoient que le salarié doit impérativement alerter immédiatement son employeur ou son autorité administrative compétente de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection.
Cette démarche peut s’effectuer par écrit recommandé AR ou courrier électronique avec confirmation de lecture.
Toutefois, le juge peut apporter des limites à l’exercice du droit de retrait dans les établissements sanitaires, sociaux ou médico-sociaux et il faut être extrêmement prudent dans son exercice dans les hôpitaux, les EHPAD, les établissements d’hébergement,…
Il est important de préciser que, même dans l’hypothèse d’une épidémie comme le coronavirus - Covid-19, le droit de retrait ne pourrait pas être exercé pour ce seul motif s’il porte atteinte au principe de continuité du service public hospitalier ni s’il a pour conséquence de créer pour autrui une nouvelle situation de danger grave et imminent.
Ainsi, dans le cas du Covid-19, deux conditions cumulatives pourraient permettre un droit de retrait d’un salarié :
- 1° Si un collègue présente tous les signes du virus suivant les informations communiquées par l’agence régionale de santé ;
Et, - 2° Si l’employeur n’a pas pris les mesures nécessaires pour lutter contre le virus (information sur les mesures à prendre, numéro d’urgence, si nécessaire masques distribués, liquide hydro-alcoolique mis à disposition etc.)
Le droit d’alerte pour danger grave et imminent au CSE ou CHSCT
En cas de non respect des règles sanitaires et de prévention dans les établissements privés ou publics, les représentants du personnel doivent utiliser le droit d’alerte pour danger grave et imminent.
Dans le secteur privé, il est vivement conseillé de prendre contact avec les représentants du personnel au comité social et économique de l’établissement. En effet, un représentant du personnel au CSE, qui constate qu’il existe une cause de DGI - danger grave et imminent - notamment par l’intermédiaire d’un travailleur, doit alerter immédiatement l’employeur en consignant son avis par écrit sur un registre spécial. L’employeur doit procéder immédiatement à une enquête avec le représentant du CSE qui lui a signalé le danger et prend les dispositions nécessaires pour y remédier. En cas de divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, le CSE est réuni d’urgence, dans un délai n’excédant pas 24 heures. (Art L. 4131-2 - L. 4132-2 - D. 4132-1 du CdT)
Un modèle de lettre de droit d’alerte DGI au CSE est disponible en pièce-jointe.
Dans la fonction publique hospitalière, les représentants du personnel au CHSCT, qui constatent qu’il existe une cause de danger grave et imminent, notamment par l’intermédiaire d’un travailleur, doivent alerter immédiatement l’employeur selon la procédure prévue par l’article L. 4132-2 du CdT. (Article L4131-2 du CdT toujours applicable dans la FPH).
Des jurisprudences limitant le droit de retrait
On note des jurisprudences pour les personnels de la fonction publique hospitalière qui ont pu limiter l’exercice du droit de retrait des agents.
Ainsi, il a été jugé que l’admission dans un établissement hospitalier de malades porteurs du VIH ou de l’hépatite virale B ne présentait pas, par elle-même, le caractère d’un danger grave et imminent justifiant un droit de retrait dès lors qu’un tel établissement, en raison même de sa mission, doit être apte à faire face aux risques de contagion pour ses agents et pour les tiers (CAA Versailles 2 juin 1994, Hadjab et autres c./ AP-HP). Ce précédent jurisprudentiel pourrait être rapproché de la situation actuelle de coronavirus covid-19.
Toutefois, toujours dans la fonction publique hospitalière, il a été jugé que le droit de retrait ne pouvait pas être exercé d’une manière qui puisse mettre gravement en péril la sécurité des patients, tel que l’abandon du patient dans un bloc opératoire (Cass. Crim. 2 octobre 1958).
Un cadre juridique évolutif
Le Ministère du travail a mis en ligne un document, mis à jour le 19 mars, « Questions/Réponses pour les entreprises et les salariés » :
https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/coronavirus_employeurs_et_salaries_qr_19_mars_2020.pdf
Il est important de préciser que le cadre législatif et règlementaire évoluant presque tous les jours, le secteur LDAJ va assurer une veille juridique spécifique sur la situation sanitaire du Covid-19 et tous les textes publiés seront disponibles sur le site fédéral dans cet article :
http://www.sante.cgt.fr/Special-Covid-19-Veille-et-informations-juridiques-Questions-Reponses
© Fédération CGT Santé Action Sociale - Mars 2020