Procédure disciplinaire dans la fonction publique hospitalière : Les agents poursuivis doivent être informés du droit de se taire

19 mars 2025

Conformément à l’article L. 125-1 du Code général de la fonction publique (CGFP), un agent public peut faire l’objet de poursuites disciplinaires et pénales à raison des actes accomplis à l’occasion ou en dehors de l’exercice de ses fonctions.

Un Flash Info LDAJ est disponible en pièce-jointe dans cet article.

Toutefois, un agent public doit bénéficier des garanties pour que ses droits soient respectés, dont celui d’être informé du droit de se taire, précisé par une décision récente du Conseil constitutionnel.

La faute professionnelle - La procédure disciplinaire dans la fonction publique

Même s’il n’existe pas de définition précise ni de liste exhaustive des fautes professionnelles, toute faute commise par un fonctionnaire dans l’exercice ou en dehors de l’exercice de ses fonctions l’expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale.

Ces dispositions sont applicables de la même manière aux agents contractuels. (Article L. 530-1 du CGFP).

Le pouvoir disciplinaire appartient à l’autorité investie du pouvoir de nomination. En cas de procédure disciplinaire, le conseil de discipline, issu de la Commission Administrative Paritaire locale ou départementale compétente pour l’agent, doit être saisi par un rapport de l’autorité investie du pouvoir de nomination.

Ce rapport doit préciser les faits reprochés au fonctionnaire hospitalier poursuivi, ainsi que les circonstances dans lesquelles ils ont été commis.

Les garanties et les droits des agents poursuivis

L’article L. 532-2 du CGFP précise qu’aucune procédure disciplinaire ne peut être engagée au-delà d’un délai de 3 ans à compter du jour où l’administration a eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits passibles de sanction.

En cas de poursuites pénales exercées à l’encontre du fonctionnaire, ce délai est interrompu jusqu’à la décision définitive de classement sans suite, de non-lieu, d’acquittement, de relaxe ou de condamnation.
Passé ce délai et hormis le cas où une autre procédure disciplinaire a été engagée à l’encontre du fonctionnaire avant l’expiration de ce délai, les faits en cause ne peuvent plus être invoqués dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

De plus, l’article L. 532-4 du CGFP ajoute que le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l’intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et l’administration doit l’informer de son droit à communication du dossier.
Enfin, le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à l’assistance de défenseurs de son choix.

Obligation d’être informé du droit de se taire

Par une décision n°2024-1105 QPC du 4 octobre 2024, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution le deuxième alinéa de l’article L. 532-4 du CGFP en ce qu’il ne prévoyait pas que le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée devait être informé de son droit de se taire devant le conseil de discipline alors que ses déclarations sont susceptibles d’être utilisées à son encontre dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

Pour le Conseil constitutionnel, en ne prévoyant pas que le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée doit être informé de son droit de se taire, ces dispositions méconnaissent les exigences de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyens de 1789.

L’abrogation de ces dispositions est reportée au 1er octobre 2025.

Toutefois, jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi ou jusqu’à la date de l’abrogation des dispositions déclarées inconstitutionnelles, le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée doit être informé de son droit de se taire devant le conseil de discipline.

Cette déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquée dans les instances introduites à la date de publication de la présente décision et non jugées définitivement.

Quid du droit de se taire en dehors de la procédure disciplinaire ?

Dans un arrêt récent (CE, 19 déc. 2024, n°490157), le Conseil d’État a indiqué que l’agent public faisant l’objet d’une procédure disciplinaire ne peut pas être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu’il soit préalablement informé du droit qu’il a de se taire. L’agent doit être avisé, avant d’être entendu pour la première fois, qu’il dispose de ce droit pour l’ensemble de la procédure disciplinaire.

En revanche, le droit de se taire ne s’applique pas aux échanges ordinaires dans le cadre de l’exercice du pouvoir hiérarchique ni aux enquêtes administratives diligentées par l’autorité hiérarchique en dehors de la procédure disciplinaire stricto sensu.

Et dans le cas où un agent n’a pas été informé du droit qu’il a de se taire, cette irrégularité est susceptible d’entraîner l’annulation de la sanction uniquement si la sanction infligée repose de manière déterminante sur des propos tenus alors que l’intéressé n’avait pas été informé de ce droit.

Autrement dit, si l’agent n’a pas été informé du droit de se taire et que ses propos ont été sans conséquence sur la sanction, celle-ci ne pourra pas être annulée sur le fondement de ce vice de procédure.

Il est probable que la jurisprudence à venir sur ce sujet permette de préciser encore plus les conditions de son application.

© Le secteur LDAJ de la Fédération CGT Santé Action Sociale - Mars 2025