Quelle politique de Prévention Spécialisée défend la C.G.T.?
La Prévention Spécialisée ne peut se définir et se comprendre que par sa mission éducative au titre de l’Aide Sociale à l’Enfance, compétence du Département. Elle doit être une dépense obligatoire.
La CGT, défend la démarche d’un travail éducatif et social basé sur la relation avec les individus, leurs groupes d’appartenance sociale et familiale et le milieu de vie :
• s’inscrivant dans la durée,
• s’appuyant sur le travail de rue
• développant les méthodes d’intervention et modes d’action propres à ce secteur
• respectant la libre adhésion, l’anonymat des publics rencontrés : jeunes et leurs familles
• favorisant la non institutionnalisation des activités pour que les politiques de prévention générale s’exercent pleinement.
Pour s’exercer le travail éducatif et social de Prévention Spécialisée s’appuie sur une équipe pluri-professionnelle et pluri-disciplinaire donc des moyens humains en nombre suffisant dans les quartiers et les cités.
Pour la CGT, l’urgence c’est d’avoir une véritable politique de l’enfance et de la jeunesse qui ne peut se réduire à quelques agitations médiatiques par exemple sur la délinquance des jeunes.
C’est le sens de l’organisation de la Rencontre nationale CGT de la Prévention Spécialisée qui se sont tenues le 17 mai 2013 à Montreuil, portant sur la « question éducative »
L’urgence pour tous les jeunes de ce pays c’est l’accès à l’éducation et à la formation, à l’emploi, à la santé, au logement, aux loisirs aux sports et à la culture...
L’urgence c’est de considérer qu’il n’y a pas assez de jeunes dans ce pays, pour en laisser des milliers tous les ans aux marges de notre société...C’est donc revenir à l’esprit de l’ordonnance de 1945, issu du programme du Conseil National de la Résistance (C.N.R.). Cette priorité à l’éducation, n’est pas plus (ou moins) archaïque que la Déclaration des Droits de l’Homme, qui, elle date du XVIIIe siècle.
Les restructurations à l’œuvre dans le secteur qui se traduisent par des regroupements, des fusions et des absorptions, un management agressif, des politiques d’encadrement budgétaire et de corsetage du dialogue social entrainent licenciements, pertes d’emplois, dégradation des conditions de travail, souffrance et perte de sens dans l’exercice professionnel, répression syndicale, criminalisation de l’action collective, atteintes aux libertés !
Partout les salariés résistent et se battent contre le cours des choses citons l’ANRAS en Midi Pyrénées et Languedoc Roussillon, l’ADAPEI des Pyrénées Atlantiques, le Centre Départemental de l’Enfance et de la Famille et la MAS de Monfermeil en Seine Saint Denis, l’IME de Varades en Loire Atlantique, l’Eclaircie en Sarthe...
Les salariés de l’action sociale de l’Isère étaient dans l’action le 22 mars 2014 contre la décision du Conseil général (socialiste) de supprimer 180 emplois dans les associations de ce département rhône-alpin par suppressions de lits. Les luttes portent sur l’emploi, les conditions de travail, la gouvernance des associations, l’exercice du droit syndical…
Depuis plusieurs années, dans beaucoup de villes, de départements, de régions, les salariés de Prévention Spécialisée défendent leur travail auprès des usagers, leurs emplois et leurs droits et garanties collectives, souvent seuls, face aux pouvoirs : publics départements et communes c’est le cas en Alsace, en Bretagne, en Bourgogne, en Lorraine, dans les Pays de Loire, en Basse Normandie, en PACA, en Ile de France, en Rhône-Alpes…
Depuis les élections de l’an dernier, les attaques contre notre secteur s’intensifient sur : les conventions, les financements, l’organisation du travail : la Prévention Spécialisée et le Milieu ouvert, l’AED, les CHRS et maintenant le placement en MECS ou foyers…
Dans quel contexte sommes-nous aujourd’hui ?
Dans un contexte de crise économique, de crise de l’emploi et d’approfondissement des politiques d’austérité et de rigueur budgétaire.
Politiques renforcées dernièrement par l’Accord National Interprofessionnel du 11 janvier 2013 qui modifie profondément le Code du Travail, l’emploi et la vie au travail des salariés. Pour la C.G.T., ce texte marque une grave régression des droits sociaux du monde du travail et va a contrario des objectifs fixés par la « Grande Conférence sociale » de juillet et celle de la « lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale ». Il contient de multiples dispositions pour faciliter les licenciements et accentuer la flexibilité.
Le chantage à l’emploi est généralisé par des accords permettant la baisse des salaires et l’augmentation du temps de travail, ce sont les accords de « compétitivité/emploi » voulus par le précédent Président de la République
La thèse du MEDEF est le principal fil conducteur de cet accord : « les licenciements d’aujourd’hui feront les emplois de demain ».
Pour la C.G.T. c’est cette logique, cette politique, dont les salariés sont la « variable d’ajustement », qui sont également à l’œuvre dans nos secteurs.
Concernant le financement :
Nos secteurs sont dans une situation dramatique, vous en savez quelque chose. La situation s’est fortement aggravée depuis quelques années, se traduisant par des fermetures de services et des licenciements : dans les CHRS, dans la protection de l’enfance et dans l’aide à domicile par exemples. Dans l’aide à domicile, ce sont des dizaines de milliers de licenciements et pertes d’emplois qui ont eu lieu ces 3 dernières années
Sur les salaires, cela s’est traduit par une « augmentation salariale » de 0 % dans la plupart des conventions ! Dans la CC 66 c’est 2 centimes d’euros proposés par le patronat associatif FEGAPEI/SYNEAS !
Les négociations dans les conventions collectives ne visent qu’à la baisse de la masse salariale et à l’individualisation des salaires au détriment de la qualification, du travail en équipe, de bonnes conditions de travail et de la qualité de prise en charge des usagers.
Les employeurs associatifs démantèlent et cassent les garanties collectives en accord voire avec la connivence du Ministère. Ces derniers mois, celui-ci s’est permis, malgré la loi du 11 février 1950 toujours en vigueur sur les conventions collectives, d’agréer une recommandation patronale unilatérale, remettant en cause la plus ancienne convention collective du secteur, à savoir la Convention Collective du 31 octobre 1951 et en renvoyant ainsi les salariés à d’hypothétiques négociations d’entreprises.
D’ailleurs le patronat associatif de la Croix Rouge Française vient de s’engouffrer dans la brèche ainsi créée en entamant une révision de la convention collective qui ressemble fort à une dénonciation !
Que nous prépare le gouvernement et les pouvoirs publics en général ?
Mme BERTINOTTI, Ministre de la Famille et chargée de la Protection annonce des assises du travail social en repositionnant les travailleurs sociaux comme « les piliers des politiques publiques, les penseurs de l’action, les promoteurs de l’avenir... »
Le Premier ministre, dans le cadre de la M.A.P. (modernisation de l’action publique) qui a remplacé la R.G.P.P. (révision générale des politiques publiques) lance un audit sur "le gouvernance de protection de l’enfance" à compter d’avril 2013. Un Comité Interministériel de la Jeunesse a eu lieu le 21 février. Un projet de loi sur la Famille sera soumis au Conseil des Ministres ; enfin le projet de loi sur la décentralisation (le fameux acte III de la Décentralisation) qui annonce le transfert de presque toute la politique d’action sociale, en particulier du handicap, sur les Départements doit être présenté au Conseil des Ministres...
Les audits ont pour objectifs de simplifier et réorganiser les politiques publiques. Elles se situent dans des perspectives budgétaires d’austérité (il s’agit de gagner encore sur les budgets 2014/15) et de faire contribuer les collectivités locales à hauteur de 750 millions en 2014 et 1,5 milliard d’euros en 2015...
Sachant le poids des dépenses d’action sociale dans les départements (de 40% à 70 %) cela ne se fera pas sans casse pour les usagers, pour les personnels et sans remise en cause des moyens...
Tous ces choix politiques auront des conséquences sur le secteur associatif, très important en matière d’action sociale.
Cela se traduira par le renforcement du processus de fusions associatives entrainant une économie d’échelle (le passage de plus de 30 000 budgets à 3000), la modification des secteurs d’intervention toujours plus grands et plus éloignés des usagers comme le vivent les salariés du milieu ouvert (A.E.M.O., S.I.O.E. )...
Cela se traduira par des coupes budgétaires comme pour les actions de Prévention Spécialisée en Seine Maritime aujourd’hui, la remise en cause des conventions, les appels d’offre ou appels à projet, le choix de conventionnements uniques imposent aux associations la dépendance à un seul financeur.
La seule PJJ, provisionne dans la Loi de finances l’argent pour plus de 300 licenciements dans le secteur associatif habilité (S.A.H.) pour l’année 2013.
La protection de l’enfance n’est donc pas seulement dans une politique de rationalisation, c’est une restructuration avec remise en cause des moyens et des missions.
La CGT refuse de cautionner et de subir cette situation qui favorise l’appauvrissement des usagers et des salariés et renforce l’insécurité sociale.
Pour la CGT, la meilleure réponse sera notre nombre dans les mobilisations à venir, ce sera notre meilleure garantie pour faire obstacle à cette politique d’austérité qui s’aggrave chaque jour, pour la défense et l’amélioration de nos garanties collectives, pour l’avancée de nos revendications, dans le respect de la qualité du service rendu aux usagers.
La CGT continuera à s’employer dans les jours et les semaines à venir à construire cette mobilisation de tout le champ sanitaire, social et médico-social, public et privé.